AIA, les bâtiments de santé doivent s’adapter au changement climatique
Construire des bâtiments hybrides et résilients
Entretien avec Emmanuelle Gaudemer, directrice du développement associée Groupe, Timothée Kleinpoort, directeur adjoint de l’agence ingénierie de Paris
et Cédrick Chaigneau, responsable du service fluide de l’agence de Nantes.
Des solutions hybrides et mixtes, bois et béton,
améliorent l’inertie d’hiver et d’été des bâtiments
L’été 2022 a été marqué par la canicule et la sécheresse à travers l’hexagone. Une situation qui devrait se répéter les années à venir et s’étendre avec des pics de chaleur du printemps à l’automne. Ce n’est pas sans danger et sans risque pour la santé. Aussi, les bâtiments hospitaliers, cliniques, hôpitaux publics ou Ehpad doivent s’adapter aux changements climatiques pour assurer le confort des occupants et continuer à prodiguer des soins de qualité. Le cabinet d’architecture et d’ingénierie nantais AIA Life Designers travaille depuis plus de 50 ans avec le milieu hospitalier afin de l’accompagner dans ses évolutions.
Comment le métier d’architecte et d’ingénieur se complètent-ils dans le domaine de la construction pour les établissements de santé ?
Emmanuelle Gaudemer : En embarquant l’architecture et l’ingénierie dans la conception et la construction, il nous est possible d’accompagner l’évolution des usages de la filière santé. Forts de plus de 50 ans d’expérience et de savoir-faire, nous comptons aujourd’hui près de 700 collaborateurs, réalisons 70 M€ de chiffre d’affaires et comptons trois agences en France et huit antennes. Cette organisation atypique répond aux besoins de nos clients dans le milieu hospitalier notamment, pour lequel la conception de bâtiment s’est complexifiée avec le temps. Des bâtiments passant également de 20 000 m2 de surface à plus de 100 000 m2 aujourd’hui. De nombreux ateliers sont organisés pour développer des innovations sur les usages et les modes constructifs notamment. La maîtrise de l’essor de l’ambulatoire, des évolutions des plateaux techniques et de la politique de santé nous permettent d’optimiser l’organisation des flux au sein des bâtiments. Qu’il s’agisse des personnes, de l’air, de l’eau, du chauffage ou de la ventilation…
Quels sont les enjeux qui attendent les bâtiments de santé ?
Timothée Kleinpoort : L’enjeu principal est environnemental. Il s’agit d’une équation à trois paramètres ? : confort, carbone et énergie. Il est nécessaire d’analyser le cycle de vie de ces bâtiments de santé et de les concevoir pour qu’ils soient adaptables aux changements climatiques, qu’ils puissent évoluer en fonction des pratiques hospitalières. L’échelle de temps donnée par la nouvelle Règlementation Environnementale 2020 est de 50 ans.. Le volet consommations énergétiques e pèse significativement dans le bilan Carbone à 50 ans et s’anticipe désormais dès la programmation de ces bâtiments de santé. Nous réfléchissons et proposons des schémas énergétiques permettant de de sortir des énergies fossiles et ainsi diminuer l’empreinte carbone de ces bâtiments. Par ailleurs, ils doivent être capables de s’adapter au climat et tendre vers davantage de résilience face aux effets de la canicule. L’objectif est la recherche, de la performance énergétique et du poids carbone le plus faible. Tout en maintenant le confort des occupants
Comment adapter le bâtiment au climat ?
Cédrick Chaigneau : Auparavant, nous regardions comment adapter le bâtiment pour qu’il soit performant essentiellement en hiver. Désormais, il s’agit de se focaliser sur son comportement en été et le rendre le plus passif possible sur cet période estivale D’autant que les effets de canicule risquent de s’étaler dans le temps, d’avril à octobre. Les grandes chaleurs seront d’autant plus difficiles à supporter physiologiquement qu’elles peuvent entraîner des risques et de l’inconfort. L’ingénierie de conception que nous menons travaille sur la résilience au changement climatique avec de nouvelles stratégies constructives pour s’adapter aux différences croissantes de saison. En effet, nous avons développé des solutions hybrides et mixtes, bois et béton, afin de limiter l’impact carbone à la construction via l’emploi du bois tout en maintenant une inertie importante recherchée l’été par l’usage du béton l’inertie d’hiver du bois et l’inertie d’été du béton. Par ailleurs, nous laissons l les éléments de charpente apparentes, ce qui, selon une étude, renforce la sensation de bien-être auprès des patients. La ventilation naturelle est renforcée, afin de décharger la chaleur nocturne en été. En hiver, il sera recherché un maximum d’apports solaires sans nuire à l’usage L’enveloppe doit être performante afin de limiter la puissance des émetteurs de chaleur. En été, les ouvertures sur l’extérieur doivent permettre à l’inverse de limiter les apports solaires grâce à des protections solaires tout en permettant de rafraîchir l’intérieur via les ouvrants et courants d’air maîtrisés. Nous concevons également des ventilateurs à grande portance à installer aux plafonds dont la vitesse uniforme et faible – pour éviter que le papier ne s’envole et le déplacement de poussière – balaie l’ensemble de la surface pour une ventilation naturelle de l’air. Cette solution est très faible en consommation d’énergie, de l’ordre de 5 à 10 fois moins qu’un climatiseur.